samedi 9 février 2013

Jocelyne Cazin vient nous donner un souffle de vie

Jeudi dernier, le 7 févrIer, madame Jocelyne Cazin est venue à Sorel-Tracy , invitée par le Centre de prévention du suicide Pierre-De-Saurel, présenter une conférence-témoignage en hommage au souffle de la vie.

En présentation, on nous a présenté le Centre, des statistiques étonnantes, leurs collaborateurs, leurs intervenants, les membres de leur conseil d'administration et leur mission.

Puis madame Cazin, animatrice, conférencière, journaliste et épicurienne a pris la parole. Quelle femme extraordinaire.  Suite au suicide, le 14 janvier 1999, de son collègue animateur à l'émission si populaire J.E. , monsieur Gaétan Girouard,  fils d'une robertoise de souche, il y a eu une recrudescence  inquiétante de suicides au Québec. Le coroner a calculé que, dans les 3 mois suivants, il y a eu 13 suicides reliés au sien.

Le souhait qu'elle caresse, par ses soirée-conférence, est qu'au moins une personne captera le message qu'il faut donner un souffle de vie.  Elle avait trois thèmes notamment:  j'ai besoin d'aide, j'ai perdu quelqu'un, ...

Elle affirme que le suicide n'est pas une option, même si sa vie n'a pas été un jardin de roses ni un long fleuve tranquille. Elle ajoute qu'elle a même envisagé d'en finir quelques fois. Plus on s'expose, plus on risque d'avoir des coups, précise-t-elle.

La vie en elle-même est un effort;  à 62 ans, elle ose vivre pleinement, vivre en faisant tout ce qu'elle a envie de faire. Retraitée de TVA depuis juin 2008, elle n'est pas sur le mode Pause, mais sur Play. Elle nous dit signer ses textes des mots: Avec plaisir.

Elle a choisi la vie avec ce que cela comporte, elle a compris que le suicide n'est pas une option, car tu es important pour moi. Ses amis, pense-t-elle, n'avaient pas le choix lorsqu'ils sont passés à l'acte. De nombreux amis l'ont quittée de cette malheureuse manière.  Elle a subi l'effet de choc à plusieurs reprises.  Nous cotoyons le mal de vivre de tellement près,  et on ne se doute pas du nombre de ravages... Le fléau de la dépression ne diminue pas.

Il y aurait annuellement plus de 14,2 millions de prescriptions d'anti-dépresseurs délivrés par nos pharmaciens, soit 1 million de plus qu'en 2010. Chez les hommes de 20-34 ans, c'est la principale cause de décès.  Elle-même a parfois été ramassée à la petite cuillère par ses amis.

Réputée la pitt-bull de l'information, rare femme dans un monde d'hommes, passionnée, intense, tout d'un morceau, pas reposante, fatigante, généreuse, exigeante, aimant les plaisirs de la vie, les superlatifs dessinent sa personnalité, nous révèle-t-elle. Elle ne fait pas dans la dentelle.

Pour faire sa place dans ce monde, elle a subi des blessures intérieures, grandes. En 1975, on lui demandait à l'audition pour un poste à la radio, d'avoir une voix d'homme.  Elle leur aurait répondu qu'elle n'avait pas ce qu'il faut entre les 2 jambes.

Un homme, au sommet de sa propre gloire radiophonique,  aurait réussi à installer le doute en elle.  Cela lui a pris du temps, le temps d'une vie,  pour comprendre qu'il est normal de n'être pas aimée par tous, que cela est impossible de séduire 100 % des gens.

Elle a appris à savoir qui elle est et à s'aimer quand même.  Enfant, d'origine française, elle n'était ni habillée comme les autres, ni ne parlait comme les autres.  Elle était la maudite française de Saint-Sauveur-des-Monts. Elle a travaillé longtemps  à prouver qu'elle avait sa place dans la société québécoise.  Arrivée à 18 mois, elle n'était arrivée que  350 ans après les autres, pense-t-elle. Elle apprend à être une battante et non pas une victime.

L'intimidation et la discrimination, par les différences, entraînent une souffrance plus grande que l'aide qui nous entoure.   Pour elle, il n'était pas question de se plaindre, élevée à la dure, servant les corbeilles à pain dés l'âge de 8 ans dans le restaurant de sa mère, elle s'intéresse à tout. Elle veut tout savoir et tout faire.  Elle avait de la graine de journaliste...

Leader dès son plus jeune âge, elle participe à une émission de TV communautaire sur le ski, elle fait aussi de la radio avec des copains.  Elle encourage les jeunes à insérer dans leur C.V. leurs souvent nombreuses activités parascolaires.

En 8ième  année scolaire, la religieuses titulaire convoque ses parents car elle est trop enjouée. Elle manquait d'esprit académique, mais elle accordait qu'elle n'était pas inquiète pour son avenir.  Elle nous ajoute que, si elle avait été adolescente en  1980, on lui aurait fait une prescription de Ritalin.

Rebelle, elle veut connaître le pourquoi du comment. Enfant unique, lors de mauvais coups, ses parents la remettent à l'ordre.  Elle apprend à détester l'injustice, n'admet pas qu'un enfant soit frappé, qu'on parle dans le dos d'un autre, etc.

Elle veut savoir de quelle place elle vient pour savoir dans quel lieu elle ira. Elle encourage les parents à reconnaître qu'un enfant qui n'a pas un esprit académique doit être encouragé et reconnu dans ce qu'il aime, afin de lui faciliter son parcours.

Elle collabore à des activités pour favoriser la persévérance scolaire, car 30 % des gars sont à risque élevé de décrochage au Québec.  Elle favorise des outils pour mieux vivre selon ses valeurs, son éducation et ses gènes. 

Elle nous parle de l'auteur Jacques Salomé qui pense que le silence des mots réveille les maux.  Ce qui ne s'exprime pas, s'imprime.

Sur beaucoup de points, elle reconnaît qu'elle était semblable à Gaétan Girouard.  Faits dans le même moule, sauf qu'un homme sait mal exprimer les émotions.  Depuis 1993, elle faisait équipe avec lui, aussi passionné l'un que l'autre, mais le doute ravage de manière insidieuse et efficace. Elle suggère que les écoles devraient permettre aux gars de vivre avec leur testostérone, leur apprendre à vivre en garçon, leur apprendre aussi à reconnaître leurs émotions et leur capacité de les exprimer.

Alors la colère, la peine, la non-acceptation, l'ennui du disparu, l'admission et enfin l'acceptation.

Le deuil très médiatisé lui a été très difficile à vivre. Elle poursuit l'animation de l'émission J.E. durant 2 ans, seule à la barre.  Puis l'agressivité, l'impatience, la lassitude, et le bout du rouleau.  Elle devenait un vrai bâton de dynamite sur 2 pattes.  Elle consulte alors et aidée d'un psychologue et d'un coach de vie, elle réapprend à se sauver sa vie.

Reconnaître qu'on pousse parfois la machine un peu trop fort, il faut savoir en rire après coup. Sinon tout cela risque de nous ronger de l'intérieur.  Il nous faut savoir se pardonner, vive la célèbre prière de la Sérénité, assure-t-elle.

Elle apprend le 8 septembre 2001, en première page du Journal de Montréal, qu'elle est sur la liste des Hells Angels.  Elle comprend qu'elle a atteint sa limite

Tombée de front, 3 mois de suivi pour se remettre en selle, elle a vécu un choc post-traumatique.  On le vivrait à moins, ne pensez-vous pas?

Elle nous donne l'exemple du gestionnaire du centre de soins de Saint-Charles-Boromée de Montréal, qui n'a pu prendre ses responsabilités, confronté à des douleurs intenses, ne parvenait plus à avoir le choix.  Dans le brouillard total et dans le fond du lac, comment mettre un terme à la souffrance...

Le doute peut devenir un assassin, l'insécurité mène à la dépression, cela n'a pas de frontière, et ne fait pas de discrimination.  Les professionnels de la santé pourraient modifer leur façon de faire, pense-t-elle.  Gaétan Girouard avait commencé un traitement aux anti-dépresseurs, 2 semaines avant le jour funeste, mais le médecin aurait peut-être pu prévenir son épouse, que ce traitement pouvait entraîner des effets dangereux durant les premières semaines d'ingestion. 

Parfois il faut ne pas se mêler de ses affaires.  Elle pensait, peut-être aurais-je été mieux de  téléphoner à son épouse, ses parents... Il faudrait  se servir d'un réseau pour avoir le plus de ressources possibles dans ces cas-là. 

Elle a décidé d'avoir confiance en la vie et a accepté de s'impliquer pour aider et aussi pour s'aider elle-même.  Il n'y a pas plus égoîste qu'un altruiste.

Jacques Languirand, notre grand promeneur de Par quatre chemins, nous explique qu'il faut s'adapter aux changements, choisis ou subis pour contrer le doute et l'insécurité. Vivre c'est s'adapter.  Cela rend la vie plus facile si on n'est pas réfractaire au changement. Parfois il nous faut aussi créer les conditions du changement.  Sur le moment, on résiste, puis on se renouvelle avec un peu de sagesse. ..

Quand François Legault l'a invitée d'aller en politique, elle a refusé ...pour le moment. A son âge, elle ne recherche plus l'approbation, elle a eu de la reconnaissance mais chacun  a besoin de ce carburant.  Une bonne tape dans le dos pour encourager, se sentir utile et reconnu est fondamental et manque souvent dans les milieux de travail ou familiaux.

Impliquée aussi contre la Sclérose en plaques, elle travaille aussi à une campagne pour les soins palliatifs de la Rivière-du-Nord, à Saint-Jérôme dans les Laurentides. Elle perd sa mère en 2012, malade et demandant à mourir chaque jour depuis qu'elle se sait condamnée.  Elle est convaincue que nos aînés ne voient plus d'issue, c'est pourquoi ils décident d'en finir. Une accumulation de pertes dans le processus de vieillissement pourrait être compensée par des visites plus nombreuses, amicales ou familiales. Elle suggère davantage de liens intergénérationnels, des rencontres entre des adolescents et des aînés...

Elle nous livre finalement des phrases célèbres d'auteurs comme Churchill, Franklin, Lowen, etc

Finalement, c'est le silence qui tue.  Alors parlons, échangeons entre nous et offrons-nous parfois une petite tape dans le dos pour encourager nos proches.

Bref une conférence-ressource qui fait du bien.  Le centre de Sorel est au 1-866-APPELLE.
ou au 1 866-277-3553 et les internvenants Louise, Nancy, Céline, Ginette, Sandra, Stéphane, Mélissa, Oriane, François-Olivier, Josée, France, et plus...sont là pour chaque personne qui souffre trop ou est proche de quelqu'un qui souffre TROP.










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1 commentaire:

  1. Merci d'encourager la prévention du suicide! Nous ne serons jamais trop à en parler.

    Nancy

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