dimanche 30 janvier 2022

On exporte 70 % de la production porcine

 Au cours des dix dernières années, à Saint-Denis-sur-Richelieu, on a produit 20 000 porcs de plus à coup de 3996 porcs ou moins à la fois. Les frères Pier-Luc et Maxime Archambault ont bien compris ce que veut dire "le droit de produire " en zone agricole.

Le ministère de l'Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) a autorisé 26 projets de porcherie par année en moyenne entre 2011 et 2017,. En 2018, le MELCC en autorisé 44, puis 53 en 2019 et 67 en 2020.

En vertu d'un règlement du MELCC, un projet de porcherie qui compte 4000 têtes ou plus doit faire l'objet d'audiences publiques menées par le BAPE qui publiera ensuite un rapport. Il suffit alors de séparer le projet en porcheries de 3999 porcs, distanciées de 150 mètres et voilà, tout va pour la croissance.

Évitant donc la tenue de véritables consultations publiques et une évaluation de l'acceptabilité sociale du projet, après que le MELCC a donné son autorisation, une "consultation" a lieu et elle est plutôt vue comme une simple séance d'information. Ce genre de "consultation" que nous avons aussi vécue à Saint-Robert, il y a quelques années, quand les porcheries de monsieur Cartier d'Yamaska ont pris de l'expansion. Un exercice bidon, mais le règlement est ainsi fait.

Ainsi l'industrie porcine peut faire indirectement ce qu'elle ne peut faire directement, avec ce règlement du MELCC. Si on abat 7,1 millions de porcs par an, ce n'est pas pour des impératifs d'autonomie alimentaire, mais pour des motfis économiques. Cette industrie, pour être compétitive sur le plan international, elle utilise l'alimentation des bêtes avec du maïs génétiquement modifié (OGM) issu du la culture intensive. Une agriculture durable et ses nobles principes prennent le bord, écrit Robert Dutrisac dans son éditorial d'hier.

Le Centre québécois du droit de l'environnement déplore une lacune: la Loi sur la qualité de l'environnement  n'oblige pas à ce qu'on prenne en compte les impacts cumulatifs des déjections d'une porcherie qui s'ajoute aux autres. La fuite réelle de phosphore dans les cours d'eau n'est pas surveillée.

En plus, cette expansion de l'industrie porcine entraîne des problèmes de cohabitation avec les citoyens, qui sont de plus en plus nombreux à sortir de la ville pour s'installer à la campagne.

L'éditorialiste croit que le gouvernement Legault devrait agir au lieu d'accepter que l'industrie utilise un stratagème pour contourner l'esprit de la loi. Il devrait faire cesser la détérioration des terres et des plans d'eau.

En Europe, on a aussi compris qu'il fallait diminuer la production porcine pour protéger les terres et les cours d'eau.

(Source: Le Devoir  dans son édition de ce week-end.)

samedi 29 janvier 2022

L'avenir de l'homme est une femme

Aragon l'écrivait déjà. Le voeu de Françoise Giroud serait exaucé: la campagne présidentielle française présente plusieurs candidates, et aux premières places, près de 40 % des intentions de votes. Pour Françoise, " la femme serait vraiment l'égale de l'homme le jour où, à un poste important, on désignerait une femme incompétente".

En Occident, le raz-de-marée s'accentue: les femmes sont les meilleures à l'école, elles sont majoritaires dans certains secteurs, elles sont maîtresses de leur corps. La révolution en cours est aussi récente que spectaculaire.

L'anthropologue de la famille et historien Emmanuel Todd a disséqué leur situation actuelle et les nouvelles contradictions en découlant, en passant au crible les racines de l'ascension des femmes. Dans Où sont-elles ? Une esquisse de l'histoire des femmes (Seuil), il parle de l'émancipation des femmes pour elles-mêmes et de leur apport pour l'ensemble de la société, de l'essor du secteur tertiaire, de la diminution de l'industrie, de la baisse de l'homophobie et de la hausse de l'individualisme.

Pour lui, une femme est tout être humain capable de porter un enfant, sauf accident de stérilité. Le modèle libéral a des systèmes familiaux nucléaires, le même système familial que les chasseurs-cueilleurs. Dans ces cultures individualistes, le statut des femmes est relativement élevé: L'émergence de l'agriculture a abaissé le statut des femmes. Le dépassement éducatif des hommes par les femmes est ancien: Dans les couples de classe moyenne, la femme est souvent davantage diplômée que l'homme, c'est l'hypogamie, par opposition à l'hypergamie. 

Le moteur de l'émancipation féminine est le développement de l'éducation, il porte la double potentialité d'une tertiarisation de l'économie et de l'avancée féminine. Pour Todd, dans une société moderne, les individus ne savent plus quoi attendre de la vie. Des déceptions surgissent. Les hommes sont toujours soumis à la même logique: travailler ou mourir de pauvreté. Il y a une opposition entre une classe moyenne très éduquée à domination féminine et une classe supérieure occupant les postes de pouvoir à domination masculine. 

Le féminisme antogoniste lui apparaît catastrophique pour les femmes 'es milieux populaires. Il empoisonne, selon Todd, les rapports entre hommes et femmes dans les milieux où l'on a le plus besoin de la solidarité du couple. L'idéologie du genre, qui fait plaisir aux petites-bourgeoises, a une responsabilité dans l'augmentation des familles monoparentales, de plus en plus présentes dans les milieux populaires et de moins en moins dans les catégories moyennes et supérieures. 

Dans l'évolution des sociétés occidentales, deux éléments li semblent centraux: l'émancipation de la femme et la montée du néolibéralisme et de l'individualisme économique. Dans la société chasseur-cueilleur, la chasse est masculine, la cueillette est féminine. Les produits de la chasse étaient répartis dans le groupe, ceux de la cueillette restent dans l'unité conjugale. Pour Todd, l'observation d'une hypertrophie du tertiaire, le déclin de l'industrie, le fait de ne pas prendre au sérieux des métiers considérés comme masculins entraînera un coût. Pour lui, nous le paierons un jour en matière de niveau de vie.

(Source: Le Point, numéro 2580 du 20 janvier)



vendredi 28 janvier 2022

L'idéologie néolibérale, selon Émilie Nicolas

Hier, Émilie nous a proposé une explication simplifiée du néolibéralisme, à la portée de tous.

  • Croire qu'une société bonne est une société libre. Que cette liberté passe par des institutions qui laissent le secteur privé sans réglementation, et les individus libres de leurs choix. 
  • Ne pas trop encadrer les compagnies dont leurs produits rendent malades: des calories vides à bas prix, dans un air et des cours d'eau à polluer, en exploitant des employés au statut précaire.
  • Presque tabou que les professionnelles de la santé demandent des choix plus responsables, de diminuer la malbouffe et les déserts alimentaires, de réformer le Code du travail, d'augmenter les espaces verts, de favoriser des lois, des politiques, des réglementations, des réformes institutionnelles pour améliorer la santé d'une collectivité. Au lieu d'enseigner séparément aux individus de choisir aliments et loisirs qui pourraient optimiser l'espérance de vie.
  • L'individu est un agent rationnel, responsable de ses choix. Les moins bons choix sont faits par des individus moins rationnels, moins responsables. Les inégalités sociales dans le domaine de la santé sont légitimes: les personnes les plus amochées n'ont qu'à faire de meilleurs choix.
  • Les meilleurs choix sont surtout accessibles aux mieux nantis. Chacun n'avait qu'à faire les bons choix de vie pour arriver à un haut niveau d'aisance matérielle. Ainsi chacun pourra choisir de manger bio, d'aller en nature les fins de semaine et de se renseigner sur les bons aliments pour éloigner les maladies. Donc des gagnants et des perdants.
  • Il y a des chances que ton soignant te juge intérieurement d'avoir choisi des choix de perdants qui t'ont rendu malade.
  • La santé publique gouvernementale sensibilise les individus de faire des choix gagnants. Mais pas de réglementer la qualité de l'air plus sévèrement dans les classes et les usines, ni de rendre l'environnement public et privé plus propice à la santé.
  • Lors d'une crise sanitaire, croire toujours à la liberté individuelle. Le gouvernement protègera le choix des individus, et surtout le choix de la liberté des entreprises.
  • Des personnes se questionneront si les institutions suivent trop le capital pour pouvoir agir dans l'intérêt public.
  • Ceux qui rejettent une mesure sanitaire n'agissent  non pas par dégoût de la solidarité sociale, mais parce qu'ils préfèrent se fier à leur propre jutement et se démerder seuls.
  • Au lieu de tenter de convaincre les individus, un par un, de faire des choix plus centristes, il faudrait prescrire des changements institutionnels profonds.
  • D'abord en examinant ce néolibéralisme et ses conséquences.
(Source: article du 27 janvier dans Le Devoir)

mercredi 26 janvier 2022

Impossible d'atteindre l'objectif de 525 kg/hab de déchets en 2025

On enfouit encore plus de déchets au Québec, depuis 2015, selon le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE), malgré les promesses gouvernementales et toute la publicité plein écran ou pleine page qu'on peut voir et lire dans les médias de masse.

Afin d'améliorer le bilan, il faudra '"réduire à la source". Hier, le rapport de 696 pages du BAPE, "L'état des lieux et la gestion des résidus ultimes", a publié que le Québec "a régressé pour chacun des objectifs inscrits au Plan d'action 2011-2015 de la Politique québécoise de gestion des matières résiduelles (PQGMR). 

Seulement le taux de recyclage de la matière organique a mieux fait. Son taux a augmenté d'à peine 2 % entre 2015-2018, atteignant 27 %. Mais l'objectif était de 60 % pour 2015. On est loin de l'atteinte de cette cible.

En 2019, nos ordures étaient 38 % supérieures à l'objectif établi dans la Plan d'action du gouvernement pour 2023. L'équivalent de 724 kg par habitant a été envoyé dans des sites d'enfouissement en 2019. L'objectif du gouvernement, pour 2025, de produire 525 kg/habitant de déchets sera "impossible" à atteindre, selon cet important rapport.

Même le ministère de l'Environnement évalue que "cet objectif ne serait toujours pas atteint en 2041" selon un scénario qualifié comme réaliste. Avant 2030, 9 des 38 dépotoirs québécois seront pleins, et 13 autres le deviendraient avant 2041. 

Les commissaires du BAPE suggèrent "l'interdiction de la mise en marché de certains produits non recyclables à usage unique ou de courte vie", "l'amélioration de l'accompagnement des consommateurs par un affichage et un étiquetage clairs quant aux impacts environnementaux" et "l'encadrement de la sollicitation publicitaire". 

Le bilan de 2018 de Recyc-Québec nous informait que 52 % des matières recyclables des résidences ont été recyclées. Les Québécois ont tout de même envoyé pas moins de 1,2 millions de tonnes de matières recyclables au dépotoir en 2019-2020.  Nous ne sommes pas très bien discipliné, me semble-t-il. Peut-être pourrait-on améliorer notre performance à ce sujet ?

S'informer, parfois permet de modifier quelques-uns de nos comportements destructeurs pour notre terre.

(Source: article d'Alexandre Shields d'aujourd'hui dans Le Devoir.)

mardi 25 janvier 2022

L'éducation subit des pertes quasi "irréversibles"

La fermeture des écoles a laissé "des pertes d'apprentissage" chez près de 70 % des enfants de 10 ans, une incapacité de lire ou de comprendre un texte simple , alors que, avant la pandémie, il y avait ces difficultés pour 53 % des enfants dans les pays à revenu faible et intermédiaire.

Les pays riches ont aussi subi ces dommages. Aux États-Unis à titre d'exemple, des pertes d'apprentissage ont aussi été constatées dans plusieurs de leurs États. Ces informations proviennent de l'agence de l'Organisation des nations unies (ONU).

"En Afrique du Sud,  quelque 400 000 à 500 000 élèves auraient abandonné l'école entre mars 2020 et juilllet 2021". De plus, ces perturbations ont affecté la santé mentale des jeunes, augmenté le risque de maltraitance et empêché plusieurs enfants d'avoir accès à "une source régulière de nutrition".  Et on connaît l'adage, qu'un enfant au ventre vide, apprend moins bien.

Et au Québec, qui mesurera les pertes d'apprentissage chez nos enfants en âge d'apprendre à lire ? Et la lecture est le meilleur outil pour persévérer dans le monde des apprentissages. Même en mathématiques, savoir bien lire les consignes exposant le problème facilite la recherche des meilleures solutions.

(Source: article de l'Agence France-Presse, publié ce matin dans Le Devoir.)

dimanche 23 janvier 2022

Prestations de confinement: un demi-milliard par semaine

Le gouvernement fédéral a dévoilé le 19 janvier dernier les coûts prévus de sa Prestation canadienne pour les travailleurs en cas de confinement (PCTCC). Un programme semblable à l'ex-PCU (prestation canadienne d'urgence), mais moins généreux et accessible seulement lorsqu'une autorité a décrété un confinement. Cette PCTCC offre 300 $ par semaine aux employés et aux travailleurs autonomes qui perdent leur revenu à cause de la fermeture ou de la réduction de la capacité de leur lieu de travail. La demande pour cette prestation peut être faite rétroactivement au 19 décembre 2021.

Selon l'estimation d'Ottawa, les mesures sanitaires du Québec coûtent au moins un demi-milliard de dollars par semaine en PCTCC. Le Québec est considéré suffisamment "en confinement" pour que les travailleurs y aient droit.

Pour le Québec, le prix plancher des prestations est estimé à 1,1 milliard de dollars pour deux semaines. Comme nous sommes à la cinquième semaine de prestations, la somme destinée aux Québécois s'élèverait à au moins 2,75 milliards jusqu'ici.

Dans la définition d'un confinement,  les critères d'admissibilité à la PCTCC incluront  les ordres de réduction de la capacité des lieux publics d'au moins 50 %, jusqu'à la mi-février.

Selon la dernière mise à jour économique du gouvernement fédéral, il est prévu que 20,4 milliards de dollars serviront à soutenir le revenu lié à la COVID-19 destiné aux travailleurs pour 2021-2022.

Sous la forme de la PCU, 74 milliards de dollars ont été versés. La Prestation canadienne de la relance économique (PCRE) a distribué 28,4 milliards avant sa dissolution en octobre 2021.

(Source: article de Boris Proulx, correspondant parlementaire à Ottawa, du Devoir, le 20 janvier 2022)

samedi 22 janvier 2022

La croissance démographique descendra en dessous de 1 % en 2023

La croissance démographique était soutenue par les forces du développement économique et de l'émancipation des femmes, conjuguées. Elle consumait les ressources naturelles et dévastait l'environnement depuis deux cents ans. Maintenant les décideurs politiques et scientifiques découvrent une nouvelle réalité: le monde décline.

L'ère amorcée depuis la révolution industrielle prend fin. La population mondiale a atteint 7,8 milliards alors qu'elle n'était que d'un milliard en 1800. À la fin des années 1960, la croissance était de 2,9 %, mais sera de 1 % en 2023, selon une étude de l'université de l'État de Washington publiée en 2021.

En 2017, la tranche des 15-64 ans, les personnes en âge de travailler, a connu un taux de croissance sous 1 %. En 2050, 151 pays des 195 pays de la planète seront en décroissance démographique.  Après 2064, avec l'atteinte d'un pic de la population mondiale à 9,7 milliards, l'étude parle d'un fléchissement.

Ce serait la première fois de son histoire, que l'humanité entamera un déclin prolongé. La population d'un pays commence à décliner quand la fécondité tombe en dessous du taux de remplacement de 2,1, avec, à la clé, des pénuries de main-d'oeuvre, une crise des fonds de retraite et la fin des vieux modèles économiques.

En 2100, l'étude prévoit que 23 pays, dont le Japon, verront fondre leur population de moitié par rapport à leur niveau actuel. La natalité recule plus rapidement que prévu dans les pays en développement. Cette décroissance pourrait  permettre de remédier à certains problèmes chroniques écologiques ou sociaux. Toutefois, iI faudra trouver un nouveau mode de prospérité.

L'évolution des taux de fécondité est expliquée en bonne partie par le nombre croissant de femmes diplômées. Le taux de fécondité reste faible dans tous les pays où les femmes font des études supérieures.

En Europe, dès 2022, la population commencerait à décliner. Des failles sont en train d'apparaître dans ce système basé sur une croissance et une inflation fortes. Le Fonds monétaire international (FMI) note qu'une baisse de la population peut affecter l'efficacité des politiques monétaires. La transition numérique et la montée en compétences des travailleurs pourront néanmoins améliorer la productivité. En outre l'innovation permettrait de répondre au défi d'une population vieillissante.

Sans l'immigration, plusieurs économies développées ne pourront plus satisfaire leurs besoins en main-d'oeuvre. Les plus de 65 ans forment 21 % de la population, le PIB par habitant dépasse les 44000 $, les entreprises ne peuvent plus financer le système de sécurité sociale, l'État deviendra la seule option.

Quand la population devient un élément central de la politique environnementale, le "racisme et la xénophobie attendent toujours dans les coulisses".

(Source: un dossier de Kazuo Yansae, Yohei Matsuo, Eugene Lang et Eri Sugiura dans Le Courrier internationale no 1628  du 13 au 19 janvier 2022)

vendredi 21 janvier 2022

Concessions sur leur dignité

La relative indifférence avec laquelle on interprète la gourmandise des ultrariches indique bel et bien que la "nouvelle normalité" forgée par la pandémie devient celle où un nombre grandissant de gens sont contraints de faire toujours un peu plus de concessions sur leur dignité, écrivait Aurélie Lanctôt, ce matin, dans Le Devoir.

Plus le déséquilibre entre ceux qui possèdent et ceux qui meurent lentement de toutes les privations devient grotesque, spectaculaire, plus les chiffres versent du côté de l'abstration, pense-t-elle. Les conséquences du capitalisme pandémique se font sentir aussi chez nous. Le spectacle de la détresse ordinaire ne suscite pas tant l'indignation que le fait qu'un dirigeant moyen parmi les 100 mieux payés au pays aura gagné en quatre jours le salaire annuel du Canadien moyen, a expliqué David Macdonald, économiste principal au Centre canadien de politiques alternatives, publié par la Presse Canadienne du 5 janvier.

En 2020, alors que plusieurs Canadiens voyaient leurs heures coupées ou perdaient leur emploi lors de confinements répétés et de fermetures forcées, les 100 patrons les mieux payés des sociétés cotées en Bourse ont gagné en moyenne 10,9 millions de dollars. Une baisse par rapport au record de 11,8 millions en 2018, mais une augmentation de 95 000 $ par rapport à 2019. 

Alors que la plupart des entreprises qu'ils dirigent a subi des dommages dus à la pandémie, les grands patrons ont reçu le deuxième salaire en importance jamais enregistré "tout un exploit", selon l'économiste Macdonald. Les mauvais rendements observés pendant la pandémie n'ont pas affecté la rémunération des patrons. Généralement les chefs de la direction justifient leurs primes par leur travail exceptionnel. "Je pense que cela illustre vraiment la faillite de l'idée voulant que la rémunération s'appuie en quelque sorte sur le mérite, affirme-t-il.

En moyenne, en 2020, les mieux payés gagnaient 191 fois plus que le travailleur moyen." De l'indécence ordinaire". Il faudrait utiliser davantage la fiscalité et renforcer les mécanismes de redistribution, tant à l'intérieur des sociétés du Nord que pour pallier les inégalités à l'échelle mondiale, propose madame Lanctôt ce matin. Agir dès maintenant car l'élastique des inégalités est déjà étiré au maximum, et la crise climatique fait craindre le pire, ajoute-t-elle.

Il faut cesser de détourner le regard.




mercredi 19 janvier 2022

Les salaires municipaux à Saint-Robert augmentent de 5,3 %, l'IPC de 2021 croît de 3,4 %

 Alors que l'indice du prix à la consommation pour l'année terminée le 31 décembre 2021 est de 3,4 %, les salaires municipaux à Saint-Robert ont augmenté plutôt de 5,3 %, tel qu'annoncé lors de la séance publique du 6 décembre 2021 à laquelle j'ai assisté. 

À Saint-Robert, les élus se sont basés, pour prendre cette décision, sur l'indice des prix à la consommation du mois d'octobre 2021, soit le mois où l'indice québécois des prix à la consommation a été le plus élevé durant l'année 2021. L'indice était plus élevé au Québec qu'au Canada pour ce mois-là.

Radio-Canada vient d'annoncer que ce bond est le plus important depuis 30 ans au Canada. Cette croissance est surtout due au prix de l'essence, puisque sans elle, l'augmentation aurait été plutôt de 4 %.

Sans surprise, cette poussée de l'inflation provient de la pandémie, selon Satistique Canada. Chacun a pu présumer que l'augmentation du prix des biens et services est une conséquence de la pandémie qui nous accable depuis 22 mois.

L'agence fédérale souligne que "les pressions inflationnistes ont découlé d'une combinaison de contraintes généralisées relatives à la chaîne d'approvisionnement mondiale et de la demande refoulée des consommateurs à mesure que l'économie reprenait".

"Les Canadiens ont pu sortir, magasiner, aller au restaurant et voyager davantage qu'en 2020, à mesure que les vaccins étaient rendus accessibles", explique l'agence fédérale. 

En 2021, les aliments ont coûté 2,5 % plus chers qu'en 2020. Le logement et le transport a aussi augmenté de 3,9 % et de 7,2 % respectivement. La croissance des prix de l'essence a été la plus rapide depuis 1981, soit 36,1 %, selon une base annuelle moyenne de l'année.

Au Québec, les prix à la consommation ont augmenté de 3,8 % en 2021. L'inflation y a été plus élevée que dans les provinces de l'ouest, mais moins élevée que dans les provinces maritimes.

Aux États-Unis, l'inflation a atteint 7 % en 2021. Le plus haut pourcentage de croissance depuis près de 40 ans.

Mais pourquoi à Saint-Robert, l'indice de l'augmentation des salaires municipaux est si élevé ? Probablement, que le train de vie de nos élus est plus élevé qu'ailleurs dans le pays. Ce motif est-il suffisant ?

On se rappelle de l'augmentation de 6 % sur 3 ans négociée pour 60 000 employés du secteur public provincial.

(Source: radio-canada, ce matin)







La croissance des prix à la consommation a épargné peu de pays à travers le monde en 2021. Aux États-Unis, plus grand partenaire commercial du Canada, l'inflation a atteint 7 % l'an dernier, du jamais-vu depuis près de 40 ans.

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mardi 18 janvier 2022

Le progrès et le bien-être mieux mesuré au Québec

Afin de dépasser le seul produit intérieur brut (PIB) pour mesurer le progrès et le bien-être, le collectif G15+ composé du Conseil du patronat du Québec, Équiterre, Fondaction, le Chantier de l'économie sociale, l'Institut du Québec et la Fondation du Grand Montréal, en plus d'une vingtaine d'organisations issues de la société civile veulent concevoir un "tableau de bord". Afin de brosser un portrait plus complet de notre réalité québécoise en matière économique, environnementale et sociale, 51 indicateurs seront analysés.

Trois grands thèmes ont été retenus. Pour l'économie, le PIB par habitant, la productivité et la qualité des emplois; pous le côté social, les inégalités de revenus, le logement et le poids de la culture dans l'économie; sur le plan environnemental, les émissions de gaz à effet de serre, la consommation d'eau potable, le nombre d'espèces menacées et le nombre de véhicules en circulation.

Les données viennent de sources crédibles comme l'Institut de la statistique du Québec, par exemple. Produites régulièrement, elles permettent d'en observer l'évolution dans le temps. Elles permettent les comparaisons car elles sont aussi mesurées et répandues dans d'autres sociétés. Elles seront comparées à celles de l'Ontario et à la moyenne canadienne, en autres.

Dans leur première version, les données proviennent des 5 années précédant la pandémie. Le Québec a progressé en matière de revenu par habitant, de productivité, de création de nouvelles entreprises. Toutefois la diplomation stagne. L'investissement en recherche et développement diminue.

Les écarts de richesse et la pauvreté ont diminué. L'accès au logement et à la santé mentale s'est dégradé. La présidente-directrice générale de Fondaction, Geneviève Morin,  est déçue que les outils nécessaires pour mesurer notre degré d'avancement en adaptation aux changements climatiques soient manquants. Un appel est lancé aux gouvernements pour que les données soient produites par leurs agences de statistiques.

La société sera transformée, ainsi que son économie, à la sortie de la pandémie.  On peut faire croître le PIB en augmentant la production de pétrole ou en augmentant la production d'énergie renouvelable. Comment mener à bien cette transformation économique, si notre éventail de données observées et analysées ne nous permet pas d'agir ensuite sur plus d'un facteur?

(Source: article d'Éric Desrosiers dans Le Devoir  d'aujourd'hui.)


lundi 17 janvier 2022

L'appauvrissement du monde depuis mars 2020

Les femmes portent sur elles le plus gros fardeau des problèmes sociaux en ce moment" explique Catherine Caron, analyste des politiques pour Oxfam-Québec, selon le dernier rapport d'Oxfam qui démontre que les inégalités n'ont jamais été aussi criantes. L'espérance de vie en 2020 a diminuée relativement à celle de 2019. Les hommes ont baissé leur espérance de vie de 5 mois à 80,6 ans et les femmes ont diminué la leur de 8 mois, à 84 ans.4

Ce sont les femmes qui "absorbent le plus grand choc". L'horizon temporel où l'égalité entre les hommes et les femmes devrait être atteinte passe ainsi de 99,5 à 135,6 ans. Oxfam dévoile un bilan où pas moins de 163 millions de personnes supplémentaires vivent avec moins de 5,50 $ depuis le début de la pandémie.

Le document d'information devient "choquant" quand on y lit le profit que les plus riches ont pu dégager durant la pandémie. La fortune des dix hommes les plus riches au monde a doublé depuis mars 2020. Au Canada, la richesse des milliardaires a augmenté de 57 % depuis deux ans, selon madame Caron.

Oxfam recommande un plus gros taux d'imposition envers les plus nantis. "Près de 8 Canadiens sur 10 sont en faveur de la taxation de la richesse pour lutter contre les inégalités et financer la relance post-pandémie" selon un sondage de novembre 2020.

Le Fonds monétaire international (FMI), l'OCDE et les 200 millénariaux fortunés regroupés dans l'association Ressources en mouvement le disent aussi. "On n'a jamais eu un appui populaire et politique aussi grand", reconnaît Catherine Caron. La taxe sur les produits de luxe du dernier budget fédéral Freeland "est un très bon premier pas. Mais on peut taxer bien plus que des yachts et des jets", admet l'analyste d'Oxfam-Québec.

Les prêts COVID-19 accordés par le FMI pour aider à amortir la crise " pousseront 73 pays vers l'austérité" quand la pandémie sera terminée. Les inégalités croissantes laissent prévoir une colère qui gronde. "Le nombre de mouvements de protestation a triplé en 15 ans à l'échelle mondiale. Dans toutes les régions, ces chiffres sont en augmentation", selon Oxfam.

(Source: article de Jean-Louis Bordeleau, dans Le Devoir, de ce matin).

dimanche 16 janvier 2022

La fin de la vie, c'est encore la vie

L'avocat français Erwan Le Morhedec ne pense pas comme la majorité concernant le droit à l'euthanasie et au suicide assisté. Ce blogueur, alias Koz, déconstruit les concepts de dignité et de liberté  et soutient qu'une telle légalisation "parachève la fracturation de la société en autant de destins individuels solitaires et concurrents".

Surtout les plus pauvres, les plus fragiles, les plus isolés ainsi que leurs proches, les soignants et la société toute entière devraient plutôt avoir le droit à des soins palliatifs, cette merveille de la médecine. Les soins palliatifs apportent alors une alternative humaine et véritable.

Pour lui, nous sommes passés d'une société du devoir à une société de l'autodétermination, où la faiblesse est méprisée et  l'individu est isolé, la société ne prenant plus en charge ses aînés. Vouloir maîtriser la mort est illusoire, selon cet avocat. Mais c'est cohérent avec les valeurs prônées par une société qui ambitionne de juguler tous les risques. 

"Tu ne tueras point" n'est pas seulement constitutif des sociétés judéo-chrétiennes, c'est un interdit civilisationnel majeur. Passer du "tu ne tueras point" à "tu tueras de temps en temps, sous certaines conditions" est un basculement. Michel Houellebecq, dans son dernier roman anéantir a raison de parler de rupture anthropologique, précise-t-il.

Quand on demande ce que les personnes souhaitent pour leur mort, ils répondent qu'ils ne veulent pas souffrir. Or la sédation profonde et continue maintenue jusqu'au décès répond à cette demande. Quand les patients ont accès aux soins palliatifs, la quasi-totalité des demandes d'euthanasie disparaît, écrit-il.

Les derniers jours de sa vie, il y a encore des choses à aimer, à dire, à vivre, à mettre en ordre. Des personnes à revoir, des pardons à advenir, des secrets à dévoiler, des dénouements à obtenir, un  regard de l'ordre de la transmission. 

Les dérives sont inéluctables, une logique dévorante. Euthanasier une personne dépressive, qui vit des troubles bipolaires ou de schizophrénie, élargir le champ d'application de la légalisation est inimaginable pour lui. 

Celui qui a les moyens a toujours la possibilité d'avoir des soignants en nombre pour lui accorder de l'attention.  Au Canada, des calculs sérieux ont été réalisés sur le coût de la fin de vie. Le seul fait de se demander quelle somme un mois de vie en moins permettrait d'économiser influence l'approche.

Pour cet avocat, la médecine des petits riens est une lumière, un des derniers témoignages de sollicitude et de fraternité que notre société propose, l'un des rares lieux que l'urgence et l'obsession budgétaire épargnent à peu près. Il faut savoir trouver des soignants qui ont le temps de nous laisser mourir en paix. Il faut éviter de voir les personnes en fin de vie comme des patients encombrants dans des services débordés.

A la fin de sa vie, ma mère a eu accès à des soins palliatifs. Elle ne voulait pas entendre parler de l'aide à mourir. Pourtant un médecin qui l'a vue la trouvait encombrante et souhaitait qu'elle parte plus vite. Mais accompagnée, avec les soins appropriés, elle voulait vivre sa vie jusqu'au bout. Pour elle, sa " fin de vie c'était encore la vie".

(Source: article de Nicolas Bastuck, dans Le Point, no 2578, du 6 janvier 2022)


vendredi 14 janvier 2022

Comment démanteler les services publics

D'abord miner la confiance des citoyens à l'égard d'un système de santé public universel. En 1976, il y avait environ 7 lits d'hôpital par mille habitants au Canada. En 2019, il n'en restait que 2,5. Lentement, il devient normal que les urgences débordent et que les ressources humaines sont insuffisantes.

Deuxièmement, quand il est temps d'équilibrer les finances publiques, presser le citron des métiers féminins: les infirmières, les enseignantes, les travailleuses sociales, les éducatrices de service de garde, les employées du secteur communautaire. Dévaloriser ces métiers, couper dans le filet social, diminuer les budgets dans la prévention de la santé publique.

Troisièmement, les services publics devenus fragiles, à l'arrivée d'une crise, le gouvernement insistera sur la responsabilité individuelle des citoyens pour ne pas engorger le système de santé et protéger les personnes les moins loties. Ainsi sera détournée l'attention des manquements gouvernementaux. Alors ce sera une minorité de personnes malfaisantes qui fera écrouler les institutions. Afin de demeurer un dirigeant populaire, les responsables des institutions ne seront pas mis en cause.

Quatrièmement, dévaloriser les sciences sociales permettra de mettre en place des mesures liberticides et d'ensuite être surpris des externalités négatives sur les enfants, les femmes et les plus vulnérables.

Cinquièmement, déprimer les personnes physiques et épargner les personnes morales. Il deviendra adéquat de fermer les écoles, mais il ne sera pas bien vu de fermer les entrepôts des sociétés internationales qui sont disposées à livrer rapidement toute commande passée virtuellement. L'être humain devient réduit à travailler, consommer et dormir. Les politiques populistes seront mieux acceptées par une population découragée et en colère. Les boucs émissaires seront ciblés et les véritables lieux de pouvoir demeureront inoffensifs.

Sixièmement, le gouvernement proposera une contribution santé pour les non-vaccinés, basée sur des renseignements contenus dans leur dossier médical, confidentiel normalement. On ne se questionnera plus sur la diminution des lits d'hôpitaux depuis 1976. On réfléchira plutôt sur la force de punition à exercer sur les marginaux.

Septièmement, laisser le mouvement populaire demander plus de mesures punitives à l'endroit du groupe démonisé, sans lien direct avec la nécessité de sauver des vies et de réduire le nombre de malades. Quand arrivera une autre crise, les dirigeants pourront s'attaquer au principe d'universalité du système public. L'objectif de détruire le filet social sera ainsi bientôt atteint. La responsabilité des maux sociaux et politiques reposera encore sur des quidams. 

Si l'énergie critique populaire cessait de se diriger vers les marges, si elle se concentrait plutôt sur ce qui se passe en haut des échelons sociaux et politiques. Le plan pourrait heureusement ainsi ne pas se réaliser. Quelle tristesse!...

(Source: article de Emilie Nicolas, Démantèlement public 101 dans Le Devoir du 13 janvier)


jeudi 13 janvier 2022

Pleins écrans: festival d'accès gratuit

Chaque jour, depuis hier, c'est la 6e édition de Pleins écrans, un festival de courts métrages québécois, gratuit sur leur site web. Trois films par jour, il faut en profiter. À pleinsecrans.com.

Aujourd'hui j'ai pu regarder Danger en face, Comme une comète et I created memories. Dans le premier, on reconnaît Guillaume Lambert, sorelois d'origine. Dans le second, on reconnaît la comédienne qui jouait la fille qui aimait trop son amoureux criminel dans Toute la vie dans une relation familiale ambiguë. Dans le troisième, sous-titré en anglais mais joué en français, j'ai retenu quelques phrases que le grand-père originaire du Sénégal partage avec sa petite-fille, Rose, jeune adolescente.

"Une fois que tu as pris l'avion, tu te rends compte que le soleil brille toujours au-dessus des nuages", explique-t-il à Rose, au moment où elle est déçue du temps nuageux.

Et "Deux personnes qui s'aiment, même après la mort, ça ne finit pas", quand il explique à Rose la peine qui perdure après le décès de la grand-mère, dans le coeur du grand-père.

J'invite chacun(e) à visionner ces courts métrages qui seront différents chaque jour pendant encore quelques jours.

mardi 11 janvier 2022

"Pour devenir centenaire, il faut commencer jeune"

Le doyen de l'Académie française toutes époques confondues a soufflé ses 100 bougies depuis plus de trois ans. René de Obaldia aime ce proverbe russe, expression d'une sagesse qu'il interroge. Pour lui, le mystère demeure encore entier. "Il faut être attentif aux autres, comprendre que l'autre est soi, l'autre, extraordinairement divers, par bonheur". Il décrit aussi sa fin, sans angoisse: "je l'attends, elle va venir". Puis il cite son ami Cocteau: "La mort, pourvu que j'arrive jusque là... La mort, j'y suis habitué. Comment cela ? J'ai été mort si longtemps avant ma naissance".

Edgar Morin, un autre centenaire, dit dans son dernier ouvrage, Attends-toi à l'inattendu, "Soyez bienveillants et compréhensifs". 

En 2021, ils étaient 26 512 centenaires français. En 1900, ils n'étaient que 100; en 1980, 1 545; en 2008, 14 500. Dans trente ans, leur chiffre aura quadruplé. Une seule étude globale datant de 1990, a été menée par Jean-Marie Rabine et Michel Allard. "À l'époque, ils n'étaient que 3 000, et nous en avions suivi 1 000 dont Jeanne Calment. Une autre étude avait souligné l'importance des traits génétiques de familles longévives".

Selon Françoise Forette, fondatrice du Centre international de la longévité, "des études japonaises ont montré que les centenaires échappaient le plus souvent au sentiment d'êtres inutiles". Les Chinois ont démontré qu'un engagement, que la poursuite prolongée d'un objectif maintenait en vie. Selon une étude néerlandaire, les optimistes ont 40 % de moins de risques de contracter des maladies cardio-vasculaires. Michel Allard parle de la faculté de l'homme à vouloir entreprendre. "Les centenaires aiment la vie. Si vous aimez la vie, elle vous aimera."

(Source: article de François-Guillaume Lorrain, avec Nicolas Bastuck, Marion Cocquet et Jérôme Cordelier, dans Le Point , hebdomadaire d'information, no 2577.

lundi 10 janvier 2022

L'ancien couvent de Saint-Ours, une page culturelle du Devoir

Le journaliste Étienne Paré a rencontré le vétérinaire en semi-retraite, Marc Vaillancourt, 77 ans, propriétaire actuel de l'ancien couvent de Saint-Ours, construit en 1897. Quatre étages, une vingtaine de chambres, le mobilier d'antan et le cachet unique de la vieille chapelle conservé, un lieu choisi pour les tournages de scènes d'époque comme dans La passion d'Augustine ou Club Vinland. Ce lieu exceptionnel est pourtant en vente depuis deux ans et demi. 

À près de 2,5 millions de dollars, les acheteurs ne se bousculent pas aux portes. Trop coûteux cet important investissement d'installer des gicleurs et des sorties de secours répondant aux normes actuelles pour faire une belle résidence pour personnes âgées. Cet ancien couvent des Soeurs de la Présentation avait été acheté en 2004 comme résidence secondaire par monsieur Vaillancourt. Cet immeuble vaut bien un château européen!

Le maire Dupuis de Saint-Ours reconnaît ce joyau patrimonial. Mais la ville ne peut l'acheter, elle est "amplement desservie par les installations municipales actuelles". Dans cette communauté d'à peine 1600 habitants, ce bâtiment demeure significatif pour plusieurs personnes qui y sont allés à l'école et qui y demeurent attachés.

Le courtier immobilier spécialisé dans la revente de patrimoine religieux, Olivier Maurice, celui-là même qui a vendu l'église paroissiale de Saint-Aimé en avril 2021, explique au journaliste Paré que "en région, la sauvegarde passe par les petits bâtiments. Les gros bâtiments, comme les couvents ou les églises, c'est beaucoup plus difficile, à moins d'un projet vraiment spécial. Le problème c'est que tout le monde veut sauver le patrimoine, mais personne ne veut y mettre l'argent," a-t-il ajouté.

Une réflexion continue pour plusieurs paroisses. Les églises sont peu fréquentées. Les paroissiens pratiquants sont rares. À la messe de la Nativité, le 24 décembre dernier, à Saint-Robert, moins de 1 % des paroissiens sont venus prier en communauté paroissiale. Sans présence renouvelée à l'église, sans dîme suffisante recueillie annuellement, que décideront les fabriques responsables d'administrer les biens du patrimoine religieux paroissial ?

On souhaite que le bâtiment religieux continue de remplir une place importante du paysage du centre d'un village. Mais le chauffage, l'entretien pour en assurer la préservation au fil du temps, les primes d'assurance, tous ces coûts minimaux sont tout de même importants.

Que décideront les paroissiens de Saint-Robert, dans quelques années, quand les ressources financières seront minces et que le bas de laine, tricoté par nos ancêtres à coup de privations et de sacrifices à même leurs maigres ressources, sera troué, que décideront alors les administrateurs ? 

(Source: l'article dans Le Devoir, de ce matin)

samedi 8 janvier 2022

Le Covid long emprisonne

 

Les prisonniers du Covid long

Fatigue, douleurs, troubles neurologiques… Certains patients infectés voient leurs symptômes persister. 

Xavier, 48 ans, est perturbé. Ce matin de décembre, en salle d'attente, il s'en veut. « L'infirmière m'a téléphoné pour me dire de venir avec ma tenue de sport. Évidemment, je l'ai oubliée », répète-t-il, soudainement anxieux. Cela arrive à tout le monde, serait-on tenté de le rassurer. « Non, c'est ma vie depuis que j'ai eu le Covid : j'oublie tout ! », soupire-t-il, dépité. Il tenait absolument à se rendre à la consultation consacrée au Covid long. 

Parmi les problèmes qui lui sont « tous tombés dessus » avec le virus, dans son assiette, les aliments ont perdu leur saveur et il ne sent plus aucune odeur. « Cela me pèse terriblement. Et, dans mon métier, l'odorat est un outil de travail, notamment pour détecter les odeurs de gaz. Désormais, je dois toujours travailler avec un collègue qui est, littéralement, mon nez », explique-t-il, son dossier médical à la main. Depuis son épisode de Covid en novembre 2020, c'est toute sa vie qui est « complètement chamboulée ». Outre des « pertes de mémoire constantes », le quadragénaire doit aussi endurer des démangeaisons sur tout le corps, une sensation de froid récurrente dans les mains et les pieds, un essoufflement au moindre effort, une fatigue omniprésente… « Si je ne suis pas en intervention, je me couche entre midi et 14 heures. Impensable avant », témoigne cet homme dynamique, au physique athlétique, dont on ne soupçonnerait pas les tourments. Les autres patients venus chercher de l'aide ce matin-là, assis silencieusement en salle d'attente, affichent une fatigue beaucoup plus visible que la sienne. Certains ont le souffle si court qu'ils ont du mal à parler. Si Xavier, à la tête d'une équipe de 17 personnes, continue d'exercer son métier, qu'il adore, il a dû mettre en place des stratégies pour ne pas mettre en péril sa vie ou celle de ses hommes. « Je n'interviens plus dans les feux. Pour travailler dans un air vicié, on porte un appareil de protection avec une bouteille à air comprimé dans le dos, un ARI [appareil respiratoire isolant, NDLR]. J'ai peur de ne plus y arriver. J'ai peur que ça ne mette fin à ma carrière. » 

Souffrances. Des récits de vies mises sens dessus dessous par des symptômes post-Covid qui n'en finissent plus, les médecins en recueillent plusieurs par semaine dans cette consultation. La plupart des malades du Covid guérissent et reviennent à une vie normale en une quinzaine de jours, mais, pour d'autres, c'est une autre affaire : ils conservent des signes cliniques pendant des semaines, voire des mois. Certains ont gardé des séquelles d'une forme grave de la maladie, comme une fibrose pulmonaire. Leurs symptômes, liés à des lésions, sont facilement explicables par les médecins. La pandémie de Covid-19 avançant, est apparue une autre population de malades : celle touchée par ce qu'on appelle désormais le Covid long. Un terme d'abord adopté par les patients eux-mêmes, avant que le corps médical ne s'en saisisse et qu'il soit reconnu par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en avril 2021. Il recouvre une myriade de symptômes : une très grande fatigue que ne soulagent ni le repos ni le sommeil, des troubles neurologiques (maux de tête, sensations « étranges »), cardio-thoraciques (douleurs et oppressions thoraciques, cœur qui s'emballe, essoufflement, toux) et de l'odorat et du goût. Les douleurs, les troubles digestifs et cutanés sont également fréquents. Sans oublier les sensations de diminution des capacités attentionnelles, le fameux « brouillard cérébral ».

Les malades sont soumis à une série d’examens, comme  l’oxymétrie, qui, avec un saturomètre, mesure le niveau de saturation en oxygène dans le sang. Aux souffrances des patients peut s'ajouter celle de ne pas être pris au sérieux par le corps médical, parfois prompt à attribuer une origine psychologique à tous leurs problèmes. Face au Covid long, dont les ressorts physiopathologiques sont encore obscurs, les médecins, notamment généralistes, sont souvent démunis. Il a bien fallu se débrouiller. Pour éviter l'errance médicale, le Dr Dervaux, médecin rééducateur, a mis en place, avec un confrère généraliste, un parcours de soins spécifique, qu'il coordonne depuis juin. « On nous adresse des patients et nous nous efforçons de faire le point sur l'histoire de chacun puis d'établir une prise en charge personnalisée », explique-t-il.

Espoirs. Pour Xavier, comme pour tous les patients, le bilan durera deux heures et demie. Analyse de sang, prise de tension, électrocardiogramme… suivis d'un test de marche de six minutes sous l'œil d'une infirmière. Rien qui ne le mette particulièrement en difficulté, même si ses capacités de récupération (évaluées par son taux d'oxygène dans le sang et sa fréquence cardiaque) sont en deçà de celles attendues d'un pompier professionnel. Le test olfactif, en revanche, tourne à l'épreuve. Parmi les dix liquides parfumés (vanille, rose, café, clou de girofle…) qui lui sont présentés, neuf lui sont complètement impossibles à identifier. Il a beau faire danser les fioles sous ses narines, rien n'y fait. « Parfois, je me demande si je ne suis pas fou », lâche-t-il. La dernière odeur lui « saute au nez » subitement. Son visage s'éclaire, alors même que celle-ci est la plus déplaisante de la collection. « Je suis tellement heureux d'avoir senti quelque chose, même si c'est du vinaigre ! » s'exclame joyeusement le pompier. Malheureusement, pas de quoi se réjouir. « Quand ils sentent ce genre de produit, les patients pensent qu'ils sont en train de récupérer leur odorat, alors que ce n'est pas le cas. Je dois souvent doucher leurs espoirs. Dans le Covid, ce sont les nerfs de l'olfaction qui sont atteints. La détection d'odeurs comme celles du vinaigre ou de la Javel persiste car elle dépend de nerfs liés à la sensibilité de la muqueuse nasale qui ne sont habituellement pas touchés. »

La grande majorité des personnes atteintes du Covid recouvre l'odorat dans les quinze jours. Six mois après l'épisode, la situation est revenue à la normale dans 95 % des cas. Au-delà de ce délai, les chances de récupération sont minces et aucun traitement n'existe pour l'anosmie. Seule option : l'entraînement olfactif . Pour ce faire, les soignants ont recours à des huiles essentielles. « En neurologie, la rééducation repose en général sur l'entraînement. Même si nous espérons rendre service aux gens, on doit être honnête avec eux : nous n'avons aucune preuve que cela fonctionne dans l'anosmie ».

Rééducation. On propose des ateliers dans le cadre de la réhabilitation respiratoire des patients atteints de Covid long, comme ces séances de gymnastique douce.

L'espoir de retrouver l'odorat, Nathalie s'y accroche de toutes ses forces. Cette femme de 36 ans est une des premières à avoir bénéficié de la consultation du Dr Dervaux et de ses collègues. Si elle s'estime « chanceuse d'avoir été épargnée par les problèmes respiratoires », ce n'est pas exactement qu'elle ne sent plus rien depuis son épisode de Covid d'avril 2021, bien au contraire. Toutes les odeurs du quotidien ont été remplacées par d'autres, entêtantes et particulièrement désagréables. Des « fausses odeurs » en somme, phénomène couramment observé par les ORL dans le cadre du Covid long. « Il m'arrive de sentir des odeurs d'oignon. Et, depuis trois semaines, je sens une odeur de métal. L'enfer. Maintenant, c'est quasiment tout le temps. » À la suite de sa première consultation il y a six mois, Nathalie a décidé de commencer la rééducation par l'entraînement olfactif. Jusqu'ici sans aucune amélioration. « La fatigue physique a fait place à la fatigue psychologique, lâche-t-elle d'une voix blanche. J'ai l'impression de devenir dingue, les repas sont devenus infernaux. Aujourd'hui même, au déjeuner, j'ai pleuré. » 

Impact. Xavier non plus ne peut pas retenir ses larmes. Devant Coline Schuster, la psychologue, ce père de famille qui pense « devoir être fort », peu habitué à se confier, craque. Les mots s'étranglent dans sa gorge, puis jaillissent. Il évoque, pêle-mêle, l'angoisse de se sentir physiquement et intellectuellement « diminué », la peur d'être « un boulet pour son équipe », sa propension nouvelle à s'énerver au travail, à la maison… À l'issue de la séance ponctuée d'exercices cognitifs et de mémorisation, la psychologue le rassure : ses facultés intellectuelles sont normales. « Vos scores d'anxiété et de dépression sont assez élevés. La maladie a un vrai impact sur votre qualité de vie, indique-t-elle d'une voix douce au pompier, déjà rattrapé par l'émotion. Le Covid vous a laissé des traces physiques, c'est normal que ce soit difficile. » Pour prendre en charge des « symptômes dépressifs qui s'installent », elle l'encourage à se rapprocher du centre médico-psychologique le plus proche de son domicile. Conseil réitéré par le Dr Dervaux, qui le reçoit dans la foulée. Côté symptômes respiratoires, Xavier a déjà réalisé de nombreux examens, prescrits par un cardiologue et un pneumologue. Aucun n'a mis en évidence de dysfonctionnement. Le médecin rééducateur lui propose alors de passer une épreuve d'effort permettant d'analyser comment son organisme utilise l'oxygène. « En cas d'anomalie, on pourra vous proposer un programme de réhabilitation respiratoire, fondé sur le réentraînement à l'effort », assure-t-il.

Thérapies. Si les médecins ont bien peu de solutions face à la disparition de l'odorat, ils sont mieux armés pour aider les patients sur le plan respiratoire.  Cette infirmière en réanimation de 42 ans remonte la pente après trois semaines de réhabilitation respiratoire. Au programme, tous les jours : vélo, balnéothérapie, renforcement musculaire, jeux sur Xbox, ergothérapie… Le tout dans une ambiance plus proche du club de sport décontracté que du service hospitalier.  

Dix jours après sa contamination, l'infirmière déclare une pleurésie, puis une embolie pulmonaire et un infarctus pulmonaire. Et se retrouve à la place des patients dont elle prenait soin chaque jour, en soins intensifs. « J'avais l'impression de suffoquer, avec de grosses douleurs dans le dos et dans l'épaule. » Depuis mars 2021, elle souffre de maux de tête, de fatigue, de douleurs musculaires et elle n'a récupéré ni son odorat ni son souffle. « Je suis incapable de faire des choses simples du quotidien, comme porter les courses ou laver les carreaux. J'ai trois enfants et je n'ai pas toujours la force de jouer avec eux. En un an, j'ai l'impression d'en avoir pris vingt », raconte l'infirmière en descendant d'un vélo d'appartement d'une des salles de sport du service.

Patience et persévérance. Pour prendre en charge ces formes respiratoires de Covid long, médecins et soignants ont dû faire preuve de pragmatisme. « On ne sait pas exactement ce qui se passe pour ces patientsC'est comme si les centres de commande respiratoire dans le cerveau avaient été déréglés par le SARS-CoV-2, entraînant fréquemment des phénomènes d'hyperventilation au moindre effort. Mais prendre en charge les syndromes d'hyperventilation, on sait faire. On obtient de bons résultats. » Pour les malades, il s'agit ni plus ni moins de réapprendre à faire quelque chose qu'on pense inné : respirer. En plus de l'activité physique, la jeune femme a intégré à sa routine quotidienne des exercices de respiration prescrits par la kinésithérapeute du centre. Après trois semaines de rééducation, elle se sent déjà mieux et réapprivoise son souffle. « Maintenant, quand je dois monter un escalier, je commence par réfléchir à mes inspirations et expirations pour être sûre d'arriver en haut. » Malgré un tempérament combatif, se remettre sur pied sera long et il ne faudra pas relâcher les efforts une fois le programme de quatre semaines terminé. « J'ai commandé un vélo d'appartement au Père Noël », plaisante-t-elle. La patience, c'est bien l'effort supplémentaire demandé à ces malades. « On parle de mois pour récupérer », indique le Dr Dervaux. Une bien longue peine pour ces prisonniers du Covid, qui n'espèrent qu'une chose : ne pas prendre perpète.

(Source: article de Héloïse Rambert dans le Point, hebdomadaire français du 5 janvier 2022)


mardi 4 janvier 2022

Sommes-nous en crise de la transcendance ?

La Révolution tranquille a-t-elle détruit la vieille tradition, ou même l'essentiel de la culture canadienne-française?, se demande Gérard Bouchard dans l'édition du 31 décembre de la page Idées du Devoir. Historien, sociologue, écrivain, enseignant à l'Université du Québec à Chicoutimi, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur les imaginaires collectifs, Gérard Bouchard a vu neiger.

La Révolution tranquille aurait-elle accouché d'un vide qui apporterait des maux dont le Québec souffrirait, car une société sans boussole et dépourvue d'idéaux, d'équité sociale et de moralité civique est appelée à souffrir. Les élites conservatrices et religieuses, écrit-il, ont longtemps affirmé et revendiqué la supposée fibre spirituelle du Canadien français. Peut-on en retracer les expressions et les manifestations dans les milieux populaires ou parmi les élites laïques ?

L'harmonie et la cohésion, fondées sur les valeurs anciennes peuvent-elles se concilier avec des traits confirmés de notre société élitiste, sous-alphabétisée, inégale, intolérante, favorisant si peu la liberté, la démocratie, et appuyant la censure ? A-t-on liquidé la question de la transcendance en liquidant le radicalisme irréfléchi des années 1960, s'interroge-t-il ?

La transcendance réfère à ce qui relève du surnaturel, du divin. Dans l'humanisme, elle désigne le dépassement de soi. Le sacré désigne des valeurs, des idéaux implantés qui inspirent souvent des actes d'un altruisme exceptionnel. Souvent des incroyants sont inspirés par leur patriotisme, leur nationalisme ou simplement par leur humanisme.

Mais les mythes sociaux ou nationaux peuvent aussi conduire aux altruismes les plus élevés. Nous ne devons pas nous juger trop sévèrement, pense l'historien, car dans l'histoire des sociétés, même le mouvement réformiste le plus intègre, le plus vertueux, n'a pu  réaliser les grands rêves qui l'animaient à sa naissance ?