mercredi 15 décembre 2021

"D'une société de transmission à une société de consommation"

Laure Adler, née en 1950, écrivait déjà cela. Aujourd'hui Marie Charrel, aussi romancière et journaliste économique au Monde, âgée de 39 ans, s'interroge, dans son essai "Qui a peur des vielles ?", sur la notion d'à quel âge devient-on vieille ? Paru aux éditions les Pérégrines, cet essai expose la notion que la vieillesse des femmes sera le prochain tabou à faire sauter.

"Les femmes sorties de la période fertile sont aujourd'hui encore déconsidérées, invisibilisées, comme si leur valeur sociale diminuait en même temps que leur quantité d'oestrogènes", écrit-elle. La menace que la vieillesse laisse sur le corps des femmes préoccupe les femmes, mêmes encore jeunes. En France, en 2017, on a consommé pour 233 millions $ CA en soins antirides, et 305 millions $ CA en soins du visage. Le chiffre d'affaires annuel mondial de 1000 milliards de dollars estimé par certaines études démontre le marché énorme de l'anti-âge.

Alors que l'autrice, il y a deux ans, était sur le point de recevoir des injections de Botox pour effacer quelques rides, elle a été réveillée par l'image de sa gran-mère admirée et tant aimée.  Pourquoi avoir si peur de ressembler à sa grand-mère ? Elle se rappelle alors que c'est vers six ou sept ans qu'elle avait intégré ce "double standard". "Chez les filles, un dédoublement d'une nature particulière intervient: elles deviennent "regardées", tandis que les hommes deviennent "regardeurs", écrit Marie Charrel.

"Les femmes intègrent ce regard. Elles sont regardées par un oeil intérieur, ce petit juge qui les accompagne, qui leur dit "tu n'es pas assez ceci ou cela". Dans notre société avec une histoire patriarcale, le regard de l'homme cherche d'abord les femmes d'âge fertile. La ménopause devient, pour certaines, un arrêt de mort. Alors que dans d'autres cultures, la ménopause est ressentie comme une phase positive dans la vie d'une femme. Ne faut-il pas se libérer du poids des regards des autres et retrouver les avantages d'une nouvelle liberté ?

L'essai cite un article de la revue The Economist où "ce sont les femmes états-uniennes de plus de 70 ans qui semblent constituer le groupe le plus heureux au monde, avec un indice de satisfaction de 0,5 de plus que leurs compatriotes masculins". Pourtant l'écart des revenus entre les femmes et les hommes augmente souvent à la retraite.

"L'expérience des femmes âgées est encore largement disqualifiée, tournée en dérision, bien plus que celle des hommes", selon Marie Charrel. "Il y a encore du boulot, mais ça bouge doucement". Elle cite Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne, Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants aux États-Unis. J'ajouterais Anne-Marie Dussault, du 24/60, tous les soirs à 19 heures à Radio-Canada Télé.

Des femmes agissent pour les femmes de leur génération, mais aussi pour celles de la génération suivante. " Pour qu'elles n'aient pas peur de vieillir et ne subissent pas les mêmes souffrances."

(Source:  article de Caroline Montpetit, dans Le Devoir  du 13 décembre)


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