mercredi 16 janvier 2013

Geneviève Rioux: je te crée (je te crois)

La nuit dernière, je suis restée éveillée car je voulais visionner son vibrant documentaire  présenté à Télé-Québec: Crée-moi, crée-moi pas, faire une autre oeuvre ou un bébé...

Conciliation art-famille. On se souvient, il y a 25 ans, dans son premier film,  la jeune masseuse universitaire érotique dans le film de Denys Arcand, Le déclin de l'empire américain, c'était elle.

On se souvient aussi de la belle Simone Monet-Chartrand, dans la télé-série en hommage à ce couple légendaire de notre Montérégie: Michel Chartrand et Simone Monet. 

Cela ne m'étonnerait pas que, depuis qu'elle a incarné cette femme de lettres, de culture, de conviction, de générosité, madame Rioux a senti le besoin de donner une oeuvre, une idée originale, lit-on dans le générique de son documentaire,  qui a conduit à ce premier documentaire.

Elle a eu l'idée originale, a cosigné le scénario, a mené les entrevues, a témoigné de son expérience de mère de 2 enfants, et a assuré la narration du film, selon l'information fournie par la journaliste Catherine Lalonde dans Le Devoir du 12 janvier dernier.

On donne la parole aux femmes. Des témoignages d'artistes  qui ont choisi souvent: je crée une oeuvre d'art, je me laisse absorber par l'art ou je procrée et crée une famille.

Nancy Houston a longtemps réfléchi à cette question dans un essai-journal intime: Journal de la création. Elle témoigne ici de l'architecture d'une oeuvre dans sa tête, le sentiment qu'on peut tout faire. Elle nous explique qu'elle doit beaucoup à sa vie maternelle dans sa création artistique. L'enfant est une responsabilité de femme. Elle nous parle qu'accoucher c'est un moment important dans la vie humaine, on ne peut se maquiller pour accoucher, pour allaiter, ajoute-t-elle. C'est différent du point de vue de Mahée Paiement qui a fait jaser au Bye Bye  2012. La maternité change le corps  La création demande la silence, le temps et la solitude, affirme-t-elle plus loin, pas facile à concilier avec les soins et les besoins des enfants.
La création se nourrit d'idées de toute-puissance et d'immortalité. Les artistes sont très égoïstes. Ils aiment déborder de partout, créer un monde à soi , ne pas savoir quand c'est le jour et la nuit. Ça, c'est pas possible pour une maman. Il y a là une vraie contradiction, nous explique-t-elle. La femme est élevée pour être attentive aux besoins des autres, elle culpabilise  quand elle est absente. La création requiert 3 A: l'argent, l'ambition  et l'autorité. Et elle ajoute que les femmes ont souvent un peu moins des ces éléments que les hommes.

Brigitte Haentjens, admirable metteure en scène sans enfant, nous parle aussi de l'égoïsme de la création, on s'occupe de l'oeuvre et non pas des enfants.  Elle nous parle de s'éduquer à l'art. Cette vie d'artiste l'expose à être rejetée, on s'individualise, difficile pour une femme. Elle ajoute que ces femmes sont souvent des premières de classe mais, quelle vie...

Pascalle Navarro, importante écrivaine et chroniqueuse, nous parle qu'il faut accepter de ne pas ëtre une femme parfaite.  Créer et s'assurer que tout est parfait par ailleurs, c'est impossible pour l'artiste.  Elle doit laisser des choses à l'écart pour laisser l'oeuvre jaillir de soi.

La  jeune et belle réalisatrice Anaïs Barbeau-Lavalette  a tourné en Palestine avec son jeune enfant  de quelques semaines.  Puis a créé Inch'Allah enceinte de 8 mois d'un second enfant. Je l'ai rencontré à Eastman en été 2011 avec son conjoint et son  premier enfant, une belle famille réunie autour du Festival des mots et de la création.  Beau modèle à voir vivre...

Agnès Jaoui, actrice française nous parle de ses trois adoptions car elle ne se voyait pas sans enfant, elle avait besoin de transmettre. Mais elle a aussi besoin de créer l'art pour se sentir heureuse, ajoute-elle.

L'artiste visuelle Valérie Blass, la réalisatrice de film d'animation Marie-Josée Saint-Pierre, la performeuse Mylène Roy, la chanteus Betty Bonifassi,  la  dramaturge et  comédienne Evelyne de la Chenelière, son conjoint et metteur en scène Daniel Brière, seul père du documentaire, l'historienne Liliane Blanc, le metteur en scène René-Richard Cyr et Robert Lepage, créateurs sans enfant, sont d'autres artistes qui témoignent de leur besoin de rester sur les hauteurs, laisser monter l'inspiration, être hanté par son oeuvre, créer sa vie en fonction de son art  et non pas l'inverse, comme font souvent les femmes.  Synthétise  Valérie Blass.

Mais j'aimerais ajouter que ce choix existe aussi pour d'autres catégories de femmes non artistes.  Chaque femme qui s'investit dans son travail, qui est convaincue que sa production est différente de celle du voisin, qui s'implique par un jugement professionnel personnalisé se sent aussi interpellée par ce documentaire. Une chambre à soi est parfois nécessaire aussi pour celles-là.

Il sera en rediffusion cet après-midi à 13h30 à Télé-Québec. Vite à vos enregistreurs numériques.















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