dimanche 3 février 2019

Les scientifiques sont-ils muselés au MAPAQ ? Les lobbies travestissent-ils la recherche ?

Alors qu'un agronome avec 32 ans d'expérience, Monsieur Louis Robert,  lance un cri d'alarme sur l'ingérence du privé dans la recherche publique sur les pesticides, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation (MAPAQ), André Lamontagne, décide de le congédier le 24 janvier dernier. "C'est ma décision, alors je suis très à l'aise avec ma décision", clame le ministre. Cet agronome a pourtant  voulu être loyal envers la protection de la santé des Québécois plus qu'à la protection des intérêts des entreprises privées.

Déjà en mars 2018, Radio-Canada avait une dizaine de témoignages qui révélaient une crise dans la recherche publique en agronomie. Le Centre de recherche sur les grains (CÉROM) est une institution publique. Une partie de ses travaux vise à réduire l'utilisation des pesticides nuisant à l'environnement.

Le CÉROM reçoit 68 % de son financement du ministère de l'Agriculture.  Le MAPAQ n'a pas le droit de vote au conseil d'administration. Son représentant est un invité qui peut fournir des conseils.
Dans une note interne du MAPAQ adressée à une sous-ministre adjointe, le CÉROM avait écrit qu'il était "contrôlé par des intérêts incompatibles avec l'intérêt public", et ce, déjà en mars 2018. La note fait aussi état de "tentatives d'intimidation de la direction sur les chercheurs et d'ingérence de quelques membres du CA, et notamment de son président, dans la diffusion et l'interprétation des résultats des projets de recherche".

Plusieurs rapports démontrent, ici et en Europe, que les néonicotinoïdes sont toxiques sur les pollinisateurs. Mais le président des Producteurs de grains du Québec (11 000 producteurs en 2018), écrivait "qu'il n'y a pas de risque à utiliser les néonicotinoïdes quand c'est fait en fonction de ce qui est indiqué sur l'étiquette".

La porte-parole du ministère, d'autre part, rappelait que "dans le cadre des programmes du MAPAQ, la diffusion des résultats des projets de recherche est exigée". Mais deux études réalisées au CÉROM, transmises au ministère en février et juin 2017 n'avaient toujours pas été publiées en mars 2018, selon Radio-Canada. Le CÉROM est financée en grande partie par l'État mais semble contrôlé par des intérêts privés.

Il faut se rappeler que le ministre de l'Agriculture de cette époque ne se gênait pas pour dire que "Monsanto est plus puissante que le gouvernement". Les agronomes qui conseillent les agriculteurs sont en majorité des salariés des compagnies qui vendent des pesticides. N'est-ce pas troublant ?

"Les lanceurs d'alerte sont essentiels à la démocratie", selon le président de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ), Stéphane Giroux. Le rapport de la commission Charbonneau recommandait pourtant qu'on protège les lanceurs d'alerte qui décident de parler aux journalistes pour mettre en lumière des situations inquiétantes. "Une chasse aux sorcières", selon la FPJQ.

(Source: Radio-Canada articles de Thomas Gerbet du 5 mars 2018 et du 30 janvier 2019 et articles du Devoir de Améli Pineda et Guillaume Bourgault-Côté du 31 janvier 2019 et l'éditorial de Robert Dutrisac du 1er février 2019) 




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