vendredi 18 novembre 2016

Si voter, c'était acheter

Nous sommes habitués de dire qu'acheter c'est voter. Acheter localement, choisir des produits équitables, c'est une manière de prendre position politiquement.  C'est bien connu.
 
Mais si voter était aussi une manière d'acheter. Si la politique est un marché où des politiciens se vendent à des électeurs.  L'économiste Joseph Schumpeter nous expose étonnamment que lorsque nous votons, nous nous comportons comme lorsque nous achetons. L'électeur-consommateur peut parfois faire des choix insensés mettant même la planète en péril.
 
Le marketing politique considère habituellement que le candidat vend des idées à l'électorat. Mais l'électeur moyen achète souvent plutôt un politicien plus qu'un ensemble d'idées qui pourraient changer sa vie. Le politicien se contente souvent de vendre de l'espoir comme la vendeuse de cosmétiques vend un rêve de beauté et de bien-être.
 
Le marché néolibéral pense transformer l'intérêt égoïste en bien collectif. L'enrichissement du 1 % leur permettrait ensuite de faire une répartition par un partage bienveillant avec les autres 99 %. Créer la richesse pour pouvoir la répartir, entend-on souvent.  Si notre consommation diminuait, une malheureuse décroissance économique pourrait survenir par la suite. Le marché favorise davantage  l'insouciance.
 
Une application littérale d'une technique de marketing politique est le populisme. Il s'agit de concevoir un produit susceptible de plaire à un public cible prêt à l'acheter. On ne veut plus vendre une idée, on tente plutôt de concevoir une idée que l'électorat veut acheter. On tente de montrer l'intérêt du peuple principalement, sans favoriser l'intérêt des élites. Comme un publicitaire, le populiste demeure dans les limites de la légalité tout en repoussant les limites socialement acceptables.
 
Ainsi les Américains ont acheté un candidat même si la majorité du reste du monde en est dégoûté, écrit le professeur de marketing de l'UQAC, Damien Hallegatte, dans la libre opinion publiée dans Le Devoir d'aujourd'hui. Trump a su se différencier très nettement des autres concurrents. Il devient attrayant. L'électeur a fait le choix de Trump et cela lui  "a permis d'exercer ses pouvoirs fondamentaux d'essayer un nouveau produit, de changer de fournisseur et de goûter la différence, note le professeur Hallegatte. Tout comme l'acheteur-consommateur choisit un produit en se dissolvant dans l'amoralité du marché.
 
Tant que l'électeur se contente de ce type de choix au lieu de choisir les idées, l'amoralité risque de continuer dans nos marchés politiques.
 
S'informer, se questionner, c'est s'engager.

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